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Approbation éthique de l’allongement du délai légal pour l’IVG en France

9th March 2021

Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) est favorable à un allongement du délai légal d’accès à l’IVG de 12 à 14 semaines de grossesse (14 à 16 semaines d’aménorrhée). Le CCNE déclare dans sa communication publiée le 11 décembre 2020 qu’”il n’y a pas d’objection éthique à allonger le délai d’accès à l’interruption volontaire de grossesse [IVG] de deux semaines.” Le CCNE estime dans son rapport qu’en 2018, entre 1500 et 2000 femmes françaises qui ont dépassé la limite autorisée pour les IVG en France sont conduites à se rendre aux Pays-Bas, en Espagne et en Angleterre pour d’accès à l’IVG qui y prévalent. Selon les résultats de notre étude récente, citée dans le rapport – De Zordo et al. (2020) – 70% des femmes provenant de France interrogées qui ont dû effectuer de tels voyages ont reçu un diagnostic de grossesse après 14 semaines d’aménorrhée pour diverses raisons incluant notamment l’irrégularité des cycles menstruels, l’absence de signes cliniques de grossesse et parfois la persistance des menstruations.

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Nickname: Anne-Sophie

Country: France 

Language: Français 

Story: Je suis française et j’ai vécu un avortement en Espagne en 2018.

J’ai découvert mon état trop tard pour pouvoir avorter en France (3 mois environ), je n’ai donc pas eu le choix. J’avais 27 ans et je n’avais ni envisagé ni envie d’avoir un enfant. J’étais avec mon ami depuis 6 mois environ, et malgré ma bonne santé et ma situation professionnelle stable, ce n’était pas une envie/volonté.

Cela a été un choc pour moi, car je ne voulais absolument pas avoir un enfant. La question ne se posait pas, je n’ai jamais hésité. Cela a été un moment très dur à vivre psychologiquement.

J’ai sûrement oublié la pilule une ou plusieurs fois. Seulement, je n’ai pas fait attention à mes règles, et j’ai laissé le temps passer sans y passer (je passais un concours, j’avais autre chose en tête).

J’ai tout de suite compris que le délai légal était passé en France, j’ai cru quelques minutes que je n’avais pas d’issue devant moi et que ma vie s’effondrait totalement (Comment vivre ainsi? Comment supporter le regard des autres?).

J’ai eu la chance d’être bien accompagnée par mon médecin traitant, qui a fait le nécessaire pour que j’ai rdv chez un gynéco pour une première écho 2 jours après la prise de sang.

Cette gynéco n’a pas compris mon état. Vu le délai, cela paraissait peut-être évident pour elle que je le garde. Elle n’a pas dit grand chose mais m’a renvoyé vers une psychologue. J’ai néanmoins dû supporter une écho “normale” avec l’écoute du cœur etc. En y repensant, c’est incroyable d’avoir supporté ça dans mon état, mais à ce moment-là, ma tête était ailleurs, j’y ai à peine prêté attention. Mon ami m’a avoué plus tard que cela a été assez dur à vivre pour lui.

L’espoir est revenu quand, après quelques recherches sur internet, j’ai appris que l’on pouvait avorter à ce stade dans d’autres pays d’Europe (Angleterre, Pays-Bas, Espagne). Peu d’information disponible à ce moment-là, alors j’ai contacté le Planning Familial proche de chez moi. Ils m’ont donné un rdv physique pour des raisons de confidentialité. Ils m’ont donné l’adresse en Espagne et toutes les informations nécessaires. Je ne les remercierai jamais assez.

Le lendemain, j’appelais le centre IVG (clinique privée) pour prendre rdv pour la semaine suivante.

Entre temps, j’ai réalisé tous les examens nécessaires en France (analyses de sang, carte sanguine, test trisomie). La gynéco m’a rappelé pour me donner le résultat du test trisomie, et elle a été choqué d’entendre que j’allais avorté à l’étranger.

J’ai donc bénéficié d’un arrêt maladie de mon médecin, et on est parti 2 jours à Gérone en Espagne avec mon amis. Financièrement, il a fallu compter le trajet, l’hôtel, l’opération (presque 1 000€ à régler sur place). Mes parents n’ont pas jugé mon choix et m’ont aidé financièrement. J’avais les moyens, et de toute façon j’aurai tout fait pour y arriver.

L’ambiance sur place était étrange, la salle d’attente était petite, il n’y avait que des françaises, ambiance assez détendue. Inscription à l’accueil, passage chez le psychologue (assez inutile je trouve), échographie et bilan santé, retour à la salle d’attente. Ensuite on a chacune été installées à un emplacement avec un lit (cela m’a choqué sur le moment mais il paraît que c’est pareil en France en ambulatoire). Chacune attendait son tour, un peu à la chaîne. J’avais beau savoir ce qui allait se passer, ce n’est jamais pareil quand on y est.

Le réveil fut pour moi difficile, avec une énorme douleur au bas-ventre, mais on m’a de suite administré un antidouleur en perfusion. J’ai mis du temps à me réveiller et à retrouver mes forces, et j’ai ensuite dû attendre sur une chaise car il fallait libérer les lits et les infirmières terminaient leur journée. Au bout d’une heure peut-être, ça allait mieux, et on a pu repartir avec mon ami. Je sentais bien que je dérangeais un peu, mais les infirmières et dames de l’accueil ont tout de même été très gentilles avec moi, et ont vérifié que j’allais mieux pour me laisser repartir.

En rentrant à l’hôtel, je me suis dit : ça y est, c’est fait! J’étais soulagée, on est allés se promener. Le soir en me couchant, je me suis dit : c’est fait, c’est fini, c’est terminé ! J’ai eu de grosses pertes de sang pendant quelques jours mais pas de douleurs.

Par contre, je ne m’attendais pas à ce que la suite soit difficile. J’avais pris rdv chez ma gynéco afin de contrôler l’opération (1 ou 2 semaine après) mais il y avait des restes. Elle m’a donc donné un cachet (j’ai supposé après que c’était le cachet de l’avortement médicamenteux). J’ai eu très mal, c’était dur à supporter. Nouveau rdv chez la gynéco une semaine après, toujours des restes. Nouvelle prise d’un cachet, et cette fois j’ai dû attendre 2 semaines avant de revoir la gynéco. Cette période a été très difficile, car j’étais toujours “en attente” et je ne pouvais pas reprendre ma vie sexuelle avec mon ami. Je me rappelle avoir voulu essayer un soir, pour me dire que je pouvais reprendre une vie normale, et je n’ai pas réussi et j’ai pleuré.

Il a fallu attendre encore quelques semaines, de nouveaux rdv chez le gynéco, mais tout a fini par rentrer dans l’ordre.

C’est une drôle d’expérience et ce n’est pas qqch de joyeux ou de banal comme on pourrait l’entendre. Pour certaines c’est un choix inévitable, pour diverses raisons, et heureusement que l’on peut encore avoir des opportunités comme certains pays le permettent.

 

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